Accord de branche, d’entreprise ou contrat de travail : quelles dispositions priment ?
Publié le :
09/06/2018
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Une nouvelle articulation des accords collectifs a été mise en place depuis l’ordonnance Macron « relative au renforcement de la négociation collective » parue le 22 septembre 2017. Il est alors important de savoir quelles sont les dispositions qui priment ? Celles de l’accord d’entreprise, de l’accord de branche ou encore les dispositions du contrat de travail ?
Accord de branche et accord d’entreprise : quelle différence ?
L’accord de branche ou encore appelée convention de branche est une convention conclue par les représentants des salariés et des employeurs pour des entreprises d’un même secteur d’activité. Ainsi, une convention de branche peut être nationale, régionale ou départementale au niveau catégoriel. La convention de branche régit notamment l’exercice du droit syndical et la liberté d'opinion des salariés, les éléments du salaire applicable pour chaque catégorie professionnelle.
L’accord d’entreprise est une convention négociée et signée entre la direction de l’entreprise et les représentants des salariés. Chaque année sont organisées dans l’entreprise des négociations annuelles obligatoires dites NAO. Cette négociation porte sur trois domaines : le premier a trait à la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée, le deuxième concerne l’égalité professionnelle et qualité de vie au travail. Le troisième s’interesse à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences mais se tient tous les trois ans au lieu de chaque comme les deux autres thématiques.
Le principe de faveur
Normalement, c’est la norme la plus favorable aux salariés qui doit s’appliquer au sein de l’entreprise. C’est ce qu’on appelle le principe de faveur. L’inconvénient de ce principe c’est qu’il n’a qu’une valeur légale et non constitutionnelle. En conséquence, ce principe de faveur peut être écarté dans certains cas strictement encadrés. Il arrive alors que des normes moins favorables, voire défavorables, soient appliquées aux salariés.
La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, publiée au Journal Officiel du 9 août 2016, écarte l’application du principe de faveur dans certaines situations. Par exemple, la loi écarte l’application du principe de faveur en matière de durée de travail et de congés et donne la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche.
L’articulation entre accord d’entreprise et contrat de travail
Dans la majorité des cas, c’est le principe de faveur qui s’applique entre l’accord d’entreprise et le contrat de travail. Un contrat de travail peut donc prévoir des dispositions plus favorables par rapport à l’accord de branche, à l’accord d’entreprise mais également par rapport à la loi.
Il faut savoir que si un accord d’entreprise ou de branche est plus favorable que le contrat de travail, les dispositions conventionnelles s’appliquent aux salariés.
Toutefois, l’accord d’entreprise peut parfois s’imposer au contrat de travail même s’il prévoit des dispositions moins favorables pour les salariés. Cette situation se présente en général quand il s’agit de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise. C’est aussi le cas quand il s’agit de la préservation et du développement de l’emploi.
L’articulation entre accord de branche et accord d’entreprise
Un accord collectif, qu’il soit de branche ou d’entreprise, peut prévoir des dispositions favorables aux salariés. Cependant, selon l’ordonnance Macron n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective, publiée au Journal Officiel du 23 septembre 2017, l’accord d’entreprise prime de manière générale sur l’accord de branche. Cette primauté générale s’applique qu’importe la date de conclusion de l’accord d’entreprise. Il peut donc être conclu avant ou après la date de conclusion de l’accord de branche sans que cela ait la moindre incidence sur cette primauté.
Par conséquent, l’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche qu’il soit plus ou moins favorable que ce dernier. Ainsi, le principe de faveur se trouve écarté. Cependant, il existe certains domaines dans lesquels un accord d’entreprise ne peut déroger à un accord de branche. Il s’agit notamment des salaires minimas hiérarchiques, de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes mais aussi des grilles de classification et des garanties collectives complémentaires.
En outre, un accord de branche peut prévoir que l’accord d’entreprise ne déroge pas à d’autres domaines tels que l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés, ou encore les primes pour travaux dangereux ou insalubres mais également la prévention des risques professionnels.
Pour information, il est indiqué que par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, publiée au Journal Officiel du 31 mars 2018, le législateur a ratifié en son article 15 l’ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 portant diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective est ratifiée, en plus des quatre ordonnances intervenues en septembre 2017 et de celle dite balai de décembre 2017.
Pour rappel, par sa décision n° 2018-761 DC du 21 mars 2018, le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel de la loi de ratification qui lui a été déférée. En effet, il a censuré sur le fond un seul article, à savoir celui qui dispensait l’employeur d’organiser des élections partielles suite à une annulation de l’élection des membres du comité social et économique sur des listes ne respectant pas les règles de parité hommes / femmes. Quatre autres articles ont été censurés uniquement parce qu’ils étaient sans lien avec le projet de loi. Enfin, le juge constitutionnel a formulé une réserve d’interprétation concernant l’opposabilité du délai de prescription de deux mois à l’égard des actions en nullité contre les accords collectifs.
En conséquence, toutes les ordonnances Macron ont depuis la loi de validation du 29 mars 2018 une valeur légale, rappelant que tant qu’elles ne sont pas ratifiées par le législateur les ordonnances conservent une valeur règlementaire et peuvent être déférées à ce titre devant le Conseil d’Etat.
Refus d’application d’un accord collectif
Il convient de préciser qu’un salarié peut refuser d’appliquer un accord collectif mis en place au sein de son entreprise. Dans un tel cas, il doit alors notifier son refus à son employeur par écrit. Ce refus doit s’exprimer dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle l’existence et le contenu de l’accord ont été communiqués. Ce refus peut justifier un licenciement « sui generis ». C’est un licenciement fondé sur un motif non prévu et dénué de lien avec la personne ou la situation économique de l’entreprise. Il ne rentre donc dans aucune catégorie de licenciement.
Patrick Lingibé
Ancien bâtonnier de Guyane
Membre du Bureau de la Conférence des Bâtonniers
Ancien membre du Conseil National des Barreaux
Spécialiste en droit public
Membre du réseau international d'avocats GESICA
www.jurisguyane.fr
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